Frelgeand-1

Publié le 7 Mars 2015

 

Frelgeand

 

Oui, je la connaissais cette légende. Oui, elle me hantait, elle me rendait folle, folle de peur, d’inquiétude, d’impatience… Oui, elle était présente en moi, elle m’envahissait, me rongeait peu à peu. Elle était, si mystérieuse, si surprenante, si horrifiante, mais, pourtant je ne pouvais m’empêcher d’y penser nuit et jour. Je ne pouvais lutter contre cette envie toujours plus grande de la vivre, de la découvrir. Je ne vivais que pour elle, que pour son mystère et sa sinistre histoire.

Cette légende  je l'ai vécue en entrant dans ce tableau, ce tableau que je dévorais des yeux, tant sa fantasmagorie m’intriguait, ce tableau que j’ai en quelque sorte habité, pendant une durée qui m’est encore indéterminée, ce tableau que j’ai côtoyé, que j’ai parcouru, que j’ai connu. J'ai accompagné ses paysages lugubres et affolants, son cimetière sombre, serpentant entre les différents obstacles de cette forêt regorgeant de secrets, de secrets les mieux enfouis dans les tombeaux, les mieux gardés, les plus excitants qu’il puisse exister. Ou bien même les ruines de son monastère, un monastère qui semble des plus étranges, des plus curieux. Et, ses arbres penchés, effrayants, auxquels, des mains aux doigts fins et crochus, étaient rattachées à leurs corps amaigris... Qu'étaient-ils ?  Leurs aspects, des moins ordinaires, donnaient la chair de poule… Puis ce ciel, un ciel envoûtant, des bleus, des noirs, des blancs, une symphonie de couleurs parfaitement accordés, prêtes à danser en complète harmonie, sous les ordres d’un chef d’orchestre, aux rêves endiablés et aux pensés folkloriques...

Telle était née cette légende entourée de magie et de phénomènes.

 

 

Je la vécu un soir de 1938, un vent glacial soufflait, j’étais seule, chez moi. J’habitais une maisonnette au toit de chaume, pas très confortable, mais très pratique et résistante. Assise devant mon feu qui crépitait, je contemplais ce tableau. J’étais très fatiguée et je m’endormie au coin de ma cheminée.

Quand le lendemain matin, un bruit horrifiant me réveilla en sursauts. Je regardai alors autour de moi, et je reconnus ce paysage sombre, ces arbres monstrueux, ce monastère angoissant. Je compris de suite, que j’étais dans le tableau. J’avançai doucement, jusqu’à arriver à une grande tombe, la plus grande de toutes. Il neigeait beaucoup, et les flocons scintillants, recouvraient l’inscription gravée au centre de celle-ci. De ma manche, j’essuyai la neige et je pus lire distinctement, un prénom masculin, suivit de son nom, de sa date de naissance, de sa date mort, et d’un petit texte long d’une dizaine de lignes :

 

Théodore LEGRAND

1558-1589

Le monastère de Frelgeand renferme un grand secret qui n’a jamais était découvert. Selon la légende, des moines y vivant depuis de nombreuses années, ont vu apparaître chaque nuit de pleine lune, depuis le 17 novembre 1558, des spectres qui dégageaient une lueur très puissante, accompagnée d’une douce mélodie. Et comme sous l’envoûtement de cette chanson, des moins disparaissaient sans laisser aucunes traces, sans nouvelles, sans indices, sans rien. Cette date, est le jour de ma naissance. A décompter de ce jour, la vie à Frelgeand a été bouleversée, toute existence dans ce monde est et restera rompue à jamais. Mais seule une personne peut y remédier, seule une personne peut redonner vie à cet endroit, une et une seule. Elle devra tout d’abord, la nuit du 17 novembre 1938, attendre patiemment le retour de ces esprits, en faisant face aux loups des forêts. Une fois les loups surmontés, sous un arbre vieux de 10.000 ans d’une hauteur d’environ 14 mètres, il faudra atteindre une cave secrète emplie de pièges multiples et variés, dont à ce jour aucune personne n’est finalement jamais revenue.

Si toutefois vous êtes encore en vie, vous assisterez à ce spectacle impressionnant, mais horrifiant, qui est celui des spectres. Il faudra vous munir d’une paire de lunettes conçues pour contrer les rayons de ce phénomène et d’une bourse dans laquelle se trouvera une pierre de lune, qui permettra de capturer et de supprimer ces individus à jamais. Auparavant, pour que la vie revienne, il faudra que vous  preniez la pierre que tiendra le chef de la tribu. Vous découvrirez à deux jours de marche, une grotte sombre et minuscule dans laquelle se trouvera une main. Vous devrez placer la pierre sur cette main, et réciter la prière suivante :

«Ut Deus, Agnus Dei, conveniat animam suam ut revertantur ad occasum Frelgeand magicis. Et erit in aeternum, et fratres mei. Amen »

Bon courage à vous.

 

Théodore LEGRAND, 1558-1589, extrait de ses mémoires.

 

 

 

Après avoir lu ces quelques lignes, je sentis en moi une force incroyable, qui me poussait, à sauver ce village. Je sentais que c’était à moi d’y aller, à moi de me sacrifier s’il le fallait. Mais j’avais peur, très peur, la nuit était tombée, il faisait très froid, et j’apercevais me semble-t-il des ombres. Une, deux, trois, puis quatre, elles étaient toujours plus nombreuses, je sentais l’angoisse monter en moi, je tremblais, mon cœur battait la chamade…

 

Je courus vite, très vite, jusqu’à ce que mes forces me lâchent, mais elles étaient là, toujours là… Je sentais une présence, je sentais que quelqu’un m’observais, j’avais un drôle de pressentiment… Je me blottis contre un arbre le temps de la nuit, dans le froid et la famine, mais en un sursaut me releva, et découvris sous la neige une tête sanglante décapitée, je hurlai et allai me réfugier au fond d’une petite grotte, quand tout à coup, je vis une ombre se rapprocher de plus en plus près de moi, il me paraissait distinguer une hache dans ses mains, elle avait l’air déterminée. Mais je ne pouvais pas bouger j’étais frigorifiée. Je la voyais brandir sa hache au-dessus de moi, j’avais des sueurs froides qui me coulaient dans le dos, mais je pris mon courage à deux mains, et lui criai : « Stop ! Je ne te veux rien de mal ! » Je la vis baisser son arme, et dans une petite lueur je vis apparaître un petit être, qui disparut aussi tôt. Cet endroit était vraiment étrange… Je ne comprenais plus rien, j’étais morte de fatigue. Je m’endormis tant bien que mal, au creux d’un rocher…

Au petit matin, je regardai ma montre et je vis que l’on était le 17 novembre 1938. C’était le grand jour ! J’avais dormi une grande partie de la journée déjà, il était 14h30. Comme la nuit tombait très vite sur Frelgeand, je décidai, de partir à la recherche de cet arbre.  Je revins au tombeau de Théodore LEGRAND, pour relire une deuxième fois ce texte. Je regardai autour de moi, et je vis au loin, un très grand arbre aux allures de pantin maléfique, et je partis en sa direction.

Une fois arrivée, je découvris un arbre intrigant. Il était formé à partir d’un rocher, il avait grandi tout autour de lui. Je m’approchai jusqu’à le toucher, quand derrière moi, j’entendis un grognement étrange. Je me retournai et je vis une tribu de loup affamé. De la bave leur coulée des babines, quelques-uns n’avaient plus qu’un œil, d’autres avaient la queue sanglante et la mâchoire déboîtée, c’était une scène épouvantable ! Je repensai, à l'épitaphe gravée sur le tombeau, c’est ce qu’elle avait indiqué ! Je m’empressai de grimper à l’arbre, tant dis que ces loups affamés et exécrables, tentaient de monter comme ils le pouvaient. L’un d’eux, le plus malin et le plus répugnant réussi à me rattraper. J’avais le souffle littéralement coupé, quand tout à coup, le loup se fit trancher la tête d’un coup de hache. Tandis que je reprenais mes esprits, le petit être qui avait voulu me tuer tout à l’heure, réapparut, la hache ensanglantée dans ses petites mains. Nous fîmes connaissance, il s’appelait Draven, c’était une sorte d’elfe, le seul survivant de toute son espèce. Il me raconta que cela faisait des siècles, qu’il n’avait pas vu d’humain. Draven avait le même but que moi, redonner vie, à cet endroit lugubre et malveillant. Nous décidâmes de continuer notre quête à deux. Nous entrâmes dans la cave, lorsque soudain, une nuée de flèches arriva droit sur nous. Nous eûmes le réflexe de nous baisser. Nous échappâmes de justesse à la mort et nous continuâmes notre chemin. Nous franchîmes le seuil d'une petite pièce, dans laquelle étaient présents la bourse et les lunettes. Mais avant de pouvoir s'en emparer, il fallait franchir des sables mouvants. Nous trouvâmes à notre droite, un très long bâton, qui avait dû être abandonné, par une des personnes qui nous avaient précédées. Draven se hissa sur mes épaules, et je me servis du bâton, pour les traverser.

Nous arrivâmes de l’autre côté et nous prîmes les deux objets. Draven, lui, n’avait pas besoin de lunettes, il était insensible à cette lumière. Nous attendîmes patiemment, en faisant plus ample connaissance. Il avait grandi à Frelgeand, il était né ici. Ce lieu était tout pour lui, il avait actuellement 1000 ans. Nous ne discutâmes pas plus longtemps, puisque les spectres arrivèrent quelques minutes après nos périples.

Bien cachés, une ouverture nous permettait d’observer la scène à distance, sans se faire repérer. Je mis mes lunettes, et pris la bourse. J’observai ce spectacle envoûtant et effrayant, comme le disait si bien le texte, c’était horrifiant ! Mais je décidai de ne pas attendre plus longtemps et de foncer droit devant moi, sans même regarder où je marchais. Draven me protégeait, sans lui je ne serais arrivée à rien. Il forma autour de moi une bulle qui empêchait les spectres de m’atteindre. Une fois que j’eus repéré leur chef. Je courus le plus vite que je pus. Je lui arrachai la pierre de la main et je retournai sur mes pas, décidée à les capturer à l’intérieur de la pierre de lune. Mais Draven faiblissait, il n’allait bientôt plus avoir assez d’énergie, pour me permettre de rester en sécurité et de finir de traverser cette tribu ! Je me dépêchai, mais quelque chose me retenait. Voici que les loups que j’avais vaincu tout à l’heure, s’étaient associés aux spectres, nous n’avions aucune chance… Mais malgré cela, je ne perdais pas espoir.

Je me battis loyalement avec eux. Ce fut un combat très dur et acharné. Je souffrais de nombreuses blessures, mon cœur battait à toute allure, mes mains, mes doigts tremblaient. C’était atroce. Je décidai de sortir ma pierre de lune, c’était maintenant ou jamais. Mais quand je la présentai devant moi, rien ne se passait! Les spectres étaient toujours là, ils m’affaiblissaient. L’un d’eux brandit une épée au-dessus de ma gorge, j’étais perdue. Mais au moment où l’épée allait me couper en mille morceaux, le spectre fut aspiré dans la pierre, puis un autre, et encore un. Le calme revint, j’étais tellement apaisée, mais à la fois très amollie, je m’endormis aussitôt, à bouts de forces.

Draven me réveilla le lendemain. Je souffrais encore, mais mes plaies commençaient à se refermer. Pour le petit déjeuner, nous mangeâmes un des loups que nous avions tué la veille. Ce fut un vrai régal!

Nous partîmes en direction de la grotte. Le chemin était long et tumultueux. Après deux jours de marche, nous arrivâmes enfin, comme l’avait indiqué le texte. Nous avançâmes dans la caverne. Et nous découvrîmes la main, posée sur un rocher. Nous déposâmes la pierre dans celle-ci. Aussitôt qu’elle fut posée, un grand éclair se produisit, d’une force inimaginable. Nous vîmes petit à petit, ce paysage sans âme, reprendre des couleurs, des formes, de fleurs, des animaux. La vie reprenait enfin, après tant d’années ! Nous avions réussi!

Tout revenait dans l’ordre, tout était comme le soir du 17 novembre 1558. Draven retrouva ses amis, le monastère reprit vie, les moines, les elfes, tout le monde était là ! Tout était redevenu normal. J’étais tellement fière!

Nous regagnâmes le monastère, et nous nous fîmes nos adieux. Il était temps pour moi de rentrer. Je me repositionnai à l’endroit où m’avait emmené le tableau, et dans une sorte de néant lumineux, je me retrouvai chez moi, devant ma cheminée où le feu qui crépitait.  Je regardai alors ce tableau en souriant, il avait changé de couleurs, maintenant, c’était un magnifique paysage de printemps !

 

Voilà comment s’est achevée mon incroyable histoire, dans ce pays fantastique de Frelgeand.

 

Rédigé par collège st pierre

Publié dans #Année 2014-2015

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